Histoire du « Grand Stade » des Marais à Chambly.

Les travaux de création d’un stade à Chambly : histoire d’un désastre environnemental.

1er épisode : Le projet d’un Stade de 3000 places – 3.5 hectares

La municipalité de Chambly vise la construction d’un stade de 3000 places sur une parcelle située en rive droite de la rivière de l’Esches. Voir carte et plans de situation

Situé en zone humide dans le lit majeur de la rivière, le projet de 4.4 hectares est soumis à un examen au cas par cas au titre de l’article R122-3 du code de l’environnement, c’est à dire que vu son ampleur, l’opportunité d’une évaluation environnementale est appréciée selon la nature du projet.

Le 4 août 2015, le préfet de Région après examen au cas par cas conclue que le projet n’est pas soumis (bien que situé en zone humide) à évaluation environnementale1* visée à l’article L122-1 du code de l’environnement. Voir arrêté préfectoral du 4 août 2015

Après enquête publique (novembre 2015) le projet fait ensuite l’objet d’une autorisation environnementale au titre de l’article L214-3 du code de l’environnement avec notamment une stricte interdiction d’aménager à une hauteur supérieure à celle du sol naturel actuel et un volume de déblai supérieur au remblai qui ne nécessite donc pas de compensation. Voir arrêté préfectoral portant autorisation environnementale du 15 janvier 2016.

De toute évidence cette opération est alors régulière sur le plan environnemental.

2ème épisode  : le projet d’un stade de 5000 places et d’un parking de 700 places sur 10.2 hectares

En 2017, avec la montée du club de foot et la volonté politique d’accueillir les JO 2024, le projet change d’ampleur. Désormais le stade sera situé en rive gauche et accueillera 5000 spectateurs. La rive droite sera consacré à l’aménagement d’un parking de 700 places et d’une hall olympique.

En mai 2018, les travaux démarrent : sans autorisation environnementale et sans autorisation d’urbanisme (permis d’aménager). Le marais est remblayé, ce qui est pourtant strictement proscrit, et l’exhaussement du sol atteint 3 mètres de hauteur.

Ces travaux liés à un nouveau projet qui ne dispose d’aucune autorisation sont irréguliers.

L’AAVE met alors en demeure le Maire et surtout le Préfet d’arrêter ce saccage illégal : en octobre 2018 la police de l’eau fait stopper par réquisition administrative les travaux.

  • 1errecours de l’AAVE pour obtenir la reconnaissance de l’infraction d’urbanisme constituée par ces travaux. La reconnaissance de la réalité de l’infraction sera effectuée par un jugement du TA d’Amiens le 9 juin 2020. Voir le jugement du TA d’Amiens.

Le 7 décembre 2018, le préfet de l’Oise délivre une autorisation environnementale modificative de l’autorisation environnementale initiale du 15 janvier 2016. Voir arrêté préfectoral du 7 décembre 2018

Le 20 décembre 2018, le Maire de Chambly délivre un permis d’aménager. Voir le permis d’aménager du 20 décembre 2018

Les travaux reprennent en février 2019 sans aucune évaluation environnementale

  • L’AAVE effectue un recours gracieux puis contentieux pour obtenir l’annulation de l’autorisation environnementale modificative du 7 décembre 2018 puisque au titre du code de l’environnement une évaluation environnementale aurait dû être conduite (article R122-2)

3ème épisode : la reconnaissance de l’irrégularité des travaux

  • Dans l’attente que la requête soit jugée sur le fond, un référé suspension est introduit. Rejeté (pour un motif fantaisiste) par le TA d’Amiens en juillet 2019 , le 20 octobre 2020 le Conseil d’État annule la décision du TA et donne raison à l’AAVE en suspendant l’autorisation environnementale du 7 décembre 2018 car elle aurait dû être précédée d’une évaluation environnementale. Voir la décision du Conseil d’État du 20 octobre 2020 suspendant l’autorisation environnementale du 7 décembre 2018
  • Privé de base légale en raison de la suspension de l’autorisation environnementale du 7 décembre 2018,  un référé suspension du Permis d’aménager est introduit. Pour un question d’irrecevabilité, le recours a été rejeté le 12 novembre dernier. Un pourvoi devant le Conseil d’État va être introduit.

Une demande de suspension des travaux est faite auprès du Maire dès le 21 octobre et surtout auprès du Préfet. Le 17 novembre, nous sommes informés par le préfet qu’une demande de suspension immédiate des travaux a été présentée au Maire. Le Maire refuse d’arrêter les travaux.

Par une lettre du 26 novembre 2020, Mme la Préfète précise à notre association qu’elle signifiait par lettre à M. le Maire qu’elle demandait aux services compétents de l’État de vérifier la suspension des travaux. Voir la seconde lettre de Mme la Préfète

Le vendredi 27 novembre 2020,  M. le Maire fléchit enfin et annonce la suspension des travaux. Un plan de retrait des entreprises et de sécurisation du chantier est alors mis en œuvre.

Les travaux qui ont ravagés une zone humide probablement de manière irréversibles sont enfin arrêtés

L’épilogue : vers une réparation du préjudice environnemental ?

La décision de conseil d’État est provisoire car liée a une procédure d’urgence : le tribunal administratif doit se prononcer en 2021 sur le lancement de l’évaluation environnementale.

  • Face à la gravité des irrégularité et après un premier classement sans suite malgré un constat établi sur la conduite des travaux sans autorisation, notre association dépose Plainte contre X avec Partie civile.

Il est déplorable que cette décision arrive plus de deux ans après le démarrage des travaux mais elle est inéluctable et marque la fin d’une impunité dans le saccage de l’environnement.

Le 12 12 2020

1* Qu’est ce qu’une évaluation environnementale ? Composée d’une étude d’impact mesurant l’état de l’environnement elle vise à faire intégrer par le maître d'ouvrage les préoccupations environnementale et de santé le plus en amont possible. Elle prévoit une consultation du public à l’issue de laquelle la décision de conduire ou non le projet est prise.

Voir ici le document du ministère de la transition écologique